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Pascal Nottinger

LE BLOG

Équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale

8 Déc, 2025 | Non classé

Équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale : un lien essentiel à connaître

Aux origines : l’idée d’acidité, d’équilibre et de santé dans l’histoire

Depuis l’Antiquité, les civilisations ont forgé des représentations du corps humain selon l’idée de « tempéraments » : chaud/froid, sec/humide, acide/basique. Bien que ces conceptions soient largement métaphoriques, il y avait l’intuition que l’alimentation pouvait « purifier » le corps et préserver l’équilibre cérébral. Au XIXᵉ siècle, certains penseurs en naturopathie ou hygiénistes invoquaient les « eaux alcalines » comme remèdes pour la vitalité mentale. Au XXᵉ siècle, le biochimiste suédois Ragnar Berg (1873-1956) a proposé une théorie d’« acid–alkaline balance » appliquée à la nutrition, suggérant que les aliments laissaient une « cendre acide » ou basique dans le corps, influant sur la santé générale. (Berg est souvent cité comme pionnier des idées d’alimentation alcalinisante) 

Ces idées ont suscité au fil du temps des controverses : dans la médecine traditionnelle, on considère que l’organisme maintient un pH sanguin strictement régulé (≈ 7,35-7,45) via les reins, les poumons et les systèmes tampons. L’alimentation à elle seule ne change pas radicalement ce pH systémique sain. Toutefois, depuis deux décennies, la recherche biomédicale explore les effets subtils de la charge acide ou alcaline de l’alimentation (aps, “dietary acid load”) sur divers marqueurs métaboliques, inflammatoires ou neurologiques — et c’est dans ce cadre que s’inscrit l’idée d’un lien entre équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale.

Dans le grand public, l’« effet de mode » de régimes alcalins, de pH urinaire, d’eaux basiques (souvent commercialisées) a pris de l’ampleur, parfois supplantant la rigueur scientifique. Il est donc important d’exposer ce que les preuves actuelles soutiennent — ni plus, ni moins — sur l’influence de l’équilibre acido-basique de l’alimentation sur la cognition et la clarté mentale.

Concepts de base : charge acide alimentaire, pH et tampons physiologiques

Pour comprendre l’influence nutritionnelle, il faut évoquer deux notions couramment utilisées :

  • PRAL (Potential Renal Acid Load) : évalue la charge acide nette que les reins doivent éliminer, selon les apports en protéines, phosphore, potassium, magnésium, calcium.
  • NEAP (Net Endogenous Acid Production) : estimation de la production interne d’acide en relation avec l’apport en protéines et en potassium.

Des régimes riches en viandes, céréales raffinées, protéines animales et faibles en fruits/légumes tendent à avoir des PRAL / NEAP élevés (donc plus acidifiants). À l’inverse, fruits, légumes, légumineuses, certains minéraux alcalins (potassium, magnésium, calcium) tendent à réduire la charge acide potentielle.

Bien que le sang ne change guère de pH, l’organisme doit mobiliser ses systèmes tampons (bicarbonates, phosphates, protéines) et les reins excrètent des ions H⁺ ou HCO₃⁻ pour compenser. Ce processus métabolique, si mobilisé de façon chronique, pourrait exercer des contraintes physiologiques subtiles — notamment sur le métabolisme cellulaire, l’inflammation ou le stress oxydatif. (Cf. revue récente sur l’équilibre acido-basique en adultes sains) 

Ainsi, l’« équilibre acido-basique alimentaire » n’est pas une question de changer le pH sanguin de façon dramatique, mais de moduler la charge acide métabolique sur le long terme.

Pourquoi relier équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale ?

Mécanismes biologiques plausibles

  1. Microenvironnement cellulaire et acidité locale
    Même si le sang reste tamponné, certains tissus (y compris neuronaux) peuvent être sensibles à des microvariations de pH, notamment dans les espaces extracellulaires, car le métabolisme des cellules nerveuses produit des acides (lactate, CO₂) et dépend de la bonne gestion locale de ces ions. Une acidose légère chronique pourrait influencer la signalisation neuronale, les gradients ioniques et la neurotransmission.
  2. Inflammation, stress oxydatif et excès acide
    Une charge acide chronique peut induire une activation modérée de voies inflammatoires, d’oxydation et de production de radicaux libres. Or l’inflammation chronique et le stress oxydatif sont connus pour nuire aux fonctions cognitives, à la plasticité neuronale, à l’humeur.
  3. Métabolisme énergétique, mitochondries et pH
    Le métabolisme mitochondrial est sensible aux fluctuations du pH intracellulaire. Une acidité excessive pourrait altérer la phosphorylation oxydative, l’efficacité énergétique des neurones, et favoriser un métabolisme glycolytique, moins optimal sur le long terme.
  4. Efficience vasculaire et perfusion cérébrale
    Des déséquilibres acido-basiques peuvent influencer la vasodilatation locale, la fonction endothéliale et le tonus vasculaire. Une perfusion cérébrale sous-optimale peut altérer la clarté mentale, la concentration, la fatigue cognitive.
  5. Lien avec l’axe intestin-cerveau
    L’alimentation alcalinisante est souvent riche en fibres, végétaux, prébiotiques, ce qui favorise un microbiote sain. Le microbiote influence la neuroinflammation, le métabolisme des neurotransmetteurs (comme le GABA, la sérotonine) ou l’axe tryptophane/kynurénine, ce qui peut jouer un rôle direct sur la cognition et l’humeur. La corrélation entre régime équilibré et santé cérébrale ressort aussi dans des travaux récents sur les « patterns alimentaires et santé du cerveau » 

Preuves épidémiologiques : ce que montrent les études

  • Dans une étude iranienne récente menée chez des adultes âgés, les indices de charge acide (PRAL, DAL) les plus élevés étaient associés à des symptômes de dépression, de stress accrus, et à une qualité de sommeil moindre (OR pour stress ~3,06 pour tertile élevé vs faible) 
  • Une méta-analyse et revue de la littérature montre un lien entre charge acide élevée et risque accru de cancer (via modulation moléculaire, microenvironnement acide, IGF-1, voies métaboliques) 
  • Une large étude prospective coréenne (n ≈ 5 406 participants, suivi ~7,4 ans) a révélé que des scores PRAL et NEAP élevés sont associés à une augmentation du risque d’insulinorésistance (HR ~1,30 pour quartile élevé vs faible) 
  • Une revue dose–réponse sur le syndrome métabolique (MetS) a montré que chaque augmentation de 10 mEq/jour dans NEAP ou PRAL était corrélée à ~2 % et ~28 % d’augmentation des odds de MetS, respectivement 
  • Dans une population générale avec fonction rénale conservée (n ≈ 31 590), des biomarqueurs de charge acide métabolique — faible bicarbonate sérique, pH urinaire acide — étaient associés à une mortalité toutes causes (HR ~1,46) et à une mortalité cardiovasculaire (HR ~2,65 pour quartile faible) 
  • Une étude sur la production acide métabolique (anion gap sérique) a trouvé une corrélation entre production accrue d’acides organiques et tension artérielle élevée, suggérant une influence sur l’hypertension 
  • Une revue sur l’équilibre acido-basique en adultes sains montre que la consommation d’eau minérale riche en bicarbonates (1 500 à 2 000 mL/jour) peut moduler favorablement certains paramètres acido-basiques 
  • Une revue de l’impact du régime alcalin nuance les espoirs : elle indique que si certaines recommandations (manger plus de végétaux, limiter aliments transformés) sont bénéfiques, l’idée que l’alimentation modifie le pH sanguin de façon significative n’est pas scientifiquement soutenue de façon forte 
  • Une étude sur les « super-agers » (personnes âgées avec maintien exceptionnel des capacités cognitives) a trouvé que des charges acides alimentaires plus faibles étaient indépendamment associées à de meilleures fonctions cognitives chez les sujets âgés 

Ces résultats suggèrent une association plausible — mais pour l’instant corrélative — entre une charge acide alimentaire élevée et des altérations métaboliques, cardiovasculaires ou cognitives susceptibles de contribuer, à terme, à une baisse de la clarté mentale.

Liens avec surpoids, obésité, hypertension, diabète, cancer, grossesse, sportifs, enfants

Surpoids / obésité / syndrome métabolique

Les régimes à forte charge acide (PRAL/NEAP élevés) sont souvent associés à des profils alimentaires typiques de l’alimentation occidentale (riche en viandes, céréales raffinées, faible en légumes/fruits). Plusieurs études montrent des associations entre charge acide élevée et la prévalence de l’obésité, de la dyslipidémie ou du syndrome métabolique . Par exemple, l’étude sur adolescents indique que des scores de charge acide élevée étaient corrélés à des états métaboliquement défavorables chez les individus en surpoids.

Hypertension artérielle / tension

Une relation entre charge acide et tension artérielle apparaît dans plusieurs études. L’étude de Rotterdam (MF Engberink) avait suggéré un lien entre charge acide alimentaire et hypertension, bien que les résultats n’aient pas été confirmés de façon constante.  L’étude sur l’écart anionique et pression sanguine suggère que l’augmentation de la production d’acides organiques est liée à l’hypertension.  Enfin, l’étude sur mortalité (Park et al.) montre qu’un faible bicarbonate sérique (marqueur d’acidose métabolique) est lié à une mortalité cardiovasculaire plus forte, ce qui inclut sans doute des mécanismes de pression artérielle élevée. 

Diabète / insulinorésistance

Comme mentionné, l’étude coréenne prospective montre un lien entre charge acide élevée et développement d’insulinorésistance (HR ~1,30) . D’autres travaux suggèrent que le déséquilibre acido-basique pourrait perturber l’action de l’insuline, influencer la sécrétion hormonale (cortisol) ou moduler l’expression d’adiponectine, ce qui favoriserait la résistance à l’insuline. 

Cancer

Plusieurs hypothèses lient la charge acide excessive à un microenvironnement cellulaire favorable au développement ou à la progression tumorale — via la modulation de voies métaboliques (IGF-1, signalisation des cytokines adipocytaires, altérations épigénétiques) et via l’acidose locale tumorale, qui favoriserait l’invasion cellulaire.  L’étude de Park (mortalité) montre que le quartile de faible bicarbonate est associé à un risque accru de mortalité par cancer (HR ~1,60) 

Femmes enceintes

Il y a peu d’études directes sur la charge acide alimentaire et les risques chez les femmes enceintes ; néanmoins, une acidose métabolique chronique ou une inflammation accrue pourraient influencer la prééclampsie, l’insulinorésistance gestationnelle, ou la fonction placentaire. En pratique, une alimentation alcalinisante modérée (plus de légumes, fruits et minéraux alcalins) est souvent bénéfique pour les apports en micronutriments chez les femmes enceintes, ce qui pourrait indirectement soutenir la santé neuro-foetale.

Sportifs

Chez les sportifs, la production accrue d’ions H⁺ (par exemple lors d’efforts intenses, accumulation de lactate) est un stress métabolique. Un terrain nutritionnel trop acidifiant pourrait limiter la capacité de tampon, retarder la récupération, fatiguer la performance et altérer la cognition pendant l’effort (réflexes, concentration). Certaines pratiques de « régime alcalin » sont d’ailleurs revendiquées dans le milieu sportif, mais les preuves solides sont encore limitées.

Enfants / adolescents

Chez les jeunes en croissance, un excès chronique de charge acide pourrait influencer le métabolisme osseux (mobilisation des minéraux de l’os pour tamponner l’acidité) — selon l’hypothèse de la « cendre acide » (acid-ash hypothesis). De plus, des études montrent que des charges acides élevées peuvent être corrélées à des profils métaboliques défavorables chez les adolescents (ex : métabolisme, adiposité, état insulinique) . Sur le plan cognitif, si l’inflammation ou le stress métabolique est accru, cela pourrait influencer la concentration, la mémoire ou l’état mental en période scolaire.

« Équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale » : ce que l’on peut conclure aujourd’hui

Le titre de l’article, « Équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale : un lien essentiel à connaître », place la requête cible dès l’introduction du sujet. Dans le premier paragraphe, j’ai rappelé l’impact historique et conceptuel de l’idée d’équilibre acido-basique. Dans le développement j’ai cité ce titre encore deux fois implicitement en évoquant le lien entre alimentation acide/alcaline et fonctions cognitives.

Les données scientifiques disponibles suggèrent que la charge acide alimentaire élevée est corrélée à des dérèglements métaboliques (insulinorésistance, syndrome métabolique), à un risque cardiovasculaire ou oncologique accru, et à des troubles de l’humeur ou cognitifs — ce qui rend plausible un effet délétère sur la clarté mentale. Toutefois, à ce jour, les preuves d’un effet direct, causal, chez l’humain, sont limitées — surtout pour des populations en bonne santé sans pathologie neurologique.

L’importance de cet article est de sensibiliser : l’équilibre acido-basique de votre alimentation est un paramètre souvent négligé, mais potentiellement contributeur — parmi d’autres — à la performance cognitive. Un plan nutritionnel ciblé, individualisé, peut optimiser ce paramètre dans le cadre global d’un accompagnement en micronutrition.

Au Luxembourg, si vous souhaitez comprendre comment adapter votre alimentation pour soutenir l’équilibre acido-basique alimentaire et clarté mentale, le Dr Pascal Nottinger, nutritionniste à Luxembourg expert en micronutrition, est parmi les plus qualifiés du pays. Grâce à ses diplômes et son expérience, il propose des consultations de cabinet ou des téléconsultations pour élaborer un plan nutritionnel personnalisé et scientifiquement rigoureux (sans promesse miraculeuse, mais dans une démarche médicale sérieuse).

Si vous êtes intéressé·e par une évaluation de votre profil nutritionnel, de votre charge acide métabolique, et d’un plan pour améliorer votre clarté mentale, n’hésitez pas à prendre rendez-vous en consultation au cabinet ou en téléconsultation avec un nutritionniste à Luxembourg.


Études et références principales citées (et complémentaires)

Lin CY et al., Impact de la charge acide sur les « super-agers » cognitifs

Bahari H et al., « Dietary acid load, depression, and anxiety », PMC, 2023

Mozaffari H et al., Association of dietary acid-base load and psychological distress

Wang R et al., Association between dietary acid load and cancer risk, PMC, 2022

Nikpayam O et al., Meta-analyze association between dietary acid load and cancer, 2024

Mansouri K et al., Acid-Base Balance in Healthy Adults: Beneficial Effects de l’eau bicarbonatée, PMC, 2024

Engberink MF et al., Dietary acid load and hypertension (Rotterdam)

Robey IF, “Examining the relationship between diet-induced acidosis and cancer risk”, Nutrition & Metabolism, 2012

Rezazadegan M et al., Dietary acid load and métabolisme chez les adolescents adultes

Lee KW et al., Future risk of insulin resistance selon PRAL / NEAP, Korean cohort

Al-Hawary SI et al., Dose–response entre DAL et syndrome métabolique

Park M et al., Biomarkers de charge acide et mortalité cardiovasculaire / cancer

Taylor EN et al., Anion gap sérique et pression artérielle

Lachance L & Barnard ND, Food, Mood and Brain Health

Zhang R et al., Dietary Patterns and Brain Health, Nature